Les changements autour de la rénovation énergétique ne cessent de faire leur apparition : après la suspension de MaPrimeRénov cet été, c’est maintenant au tour du DPE de subir des modifications.
Le premier ministre a annoncé le 9 juillet la baisse du coefficient de conversion de l’électricité dans le calcul du DPE en passant de 2,3 à 1,9.
Un arrêté sera signé début septembre 2025 "après une consultation publique lancée dans les prochains jours” pour une mise en application à partir du 1er janvier 2026.
Le coefficient d’énergie primaire : de quoi parle-t-on ?
Pour comprendre la réforme, il faut d’abord comprendre ce qu’est un coefficient d’énergie et bien distinguer énergie finale et énergie primaire.
- L’énergie finale est celle que vous consommez réellement chez vous : électricité, gaz, fioul…
- L’énergie primaire, elle, tient compte de toute la chaîne nécessaire pour vous alimenter avec cette énergie, notamment les pertes liées à la production et au transport.
Actuellement, le coefficient de conversion de l’électricité dans le DPE est fixé à 2,3. Cela signifie que pour 1 kWh d’électricité consommée chez vous, le DPE comptabilise 2,3 kWh en énergie primaire consommés en amont (incluant transport et production). Ce coefficient élevé pénalise les logements tout électriques dans leur notation.
À partir de janvier 2026, ce coefficient pourrait potentiellement passer à 1,9 afin de “dépénaliser” les logements chauffés par l’électrique (majoritairement bas carbone en France, grâce au nucléaire, renouvelables et notre parc hydraulique).
Ce changement permettrait de rétablir une échelle plus juste et de concentrer les efforts sur les logements utilisant les énergies fossiles (fioul et gaz) ayant l’impact le plus fort sur notre balance commerciale et sur nos émissions de CO2. Mais cette nouvelle est à nuancer :
DPE : un changement de calcul = un changement d’étiquette ?
Ce simple ajustement de coefficient peut faire basculer un logement d’une étiquette F ou G à une étiquette E sans qu’aucun travaux ne soit réalisé.
Exemple : un appartement mal isolé et chauffé à l’électricité classé F aujourd’hui pourrait être reclassé E en janvier 2026 uniquement par modification de la méthode de calcul.
Autrement dit, le confort réel et vos factures énergétiques restent les mêmes. Mais la classification s’améliore. Cette mécanique pose question : peut-on parler de progrès énergétique quand il n’y a pas eu de rénovation ?
Pour les propriétaires, le risque est de s’arrêter là, pensant que le logement est « sorti d’affaire » alors qu’il demeure énergivore.
Les conséquences inattendues sur les aides à la rénovation
Le DPE est un critère central dans l’octroi des aides à la rénovation énergétique. Pour bénéficier des aides à la rénovation d’ampleur, il faut gagner au moins deux classes énergétiques (par exemple passer de F à D).
Or, si votre logement est artificiellement reclassé de F à E, les travaux que vous envisagez pourraient ne plus suffire à franchir les deux lettres requises et donc vous priver de plusieurs dizaines milliers d’euros d’aides.
Voici un rappel des montants dont vous pourriez bénéficier à la reprise de MaPrimeRénov’ rénovation d’ampleur :

Agir maintenant : une fenêtre stratégique avant 2026
Si votre principal système de chauffage est électrique, alors votre DPE actuel risque d’être revu à la hausse d’ici janvier 2026.
Dans le cas où vous auriez prévu de réaliser un projet de rénovation d’ampleur, nous vous conseillons vivement de commencer les démarches pour Mon Accompagnateur Rénov’ dès maintenant afin de pouvoir bénéficier du montant d'aides le plus important.
Si vous souhaitez donc maximiser les aides MaPrimeRénov’, il faut déposer votre dossier avant la potentielle mise en œuvre de cette réforme (janvier 2026).
Pour cela, il vous faudra l'audit énergétique d'Ithaque, les devis des artisans et un certain nombre de pièces administratives alors autant ne pas traîner…
Fausse bonne nouvelle ? La critique de cette réforme
Le gouvernement met en avant une statistique frappante : 850 000 logements sortiraient du statut de passoire thermique avec la mise en place de ce nouveau calcul (source : Batiactu, d’après les annonces du Premier ministre).
Mais cette sortie de passoire thermique est purement méthodologique. Les logements resteront inchangés et les déperditions également. Les ménages précaires se retrouveront toujours avec des factures colossales, mais cette fois-ci avec moins d’aides pour réaliser leurs travaux.
On peut ici souligner une forme d’hypocrisie du gouvernement qui cherche en réalité à faire des économies sur le dos de la politique de rénovation énergétique.
Pour Ithaque, cette réforme risque de détourner les propriétaires d’une rénovation structurelle, pourtant essentielle à la transition écologique et au confort durable. Mais surtout, elle renforce la précarité des ménages modestes et très modestes en leur limitant la capacité financière de mener à bien des travaux.
En rendant les étiquettes « plus favorables » artificiellement, le DPE perd en cohérence énergétique
Nous rappelons que cette réforme du DPE sera actée par arrêté en septembre 2025 pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2026. Si votre logement est concerné, n’attendez pas.
Ce que propose Ithaque
De notre côté, nous défendons une approche réaliste et équitable de la rénovation énergétique.
Si la baisse du coefficient d’énergie primaire est une décision cohérente d’un point de vue technique, elle ne doit pas masquer les vrais enjeux. Pour éviter de déclasser artificiellement des logements encore très énergivores, nous proposons d’ajuster simultanément les seuils des étiquettes DPE.
L’idée : maintenir une répartition stable du nombre de passoires thermiques (F et G), afin de concentrer les aides publiques sur les ménages les plus précaires et les logements les moins performants. Ce serait là un vrai levier pour favoriser les rénovations d’ampleur et atteindre les objectifs climatiques, sans affaiblir l’impact du DPE comme outil de pilotage.
